La Brigade

Après le succès de Discount et des Invisibles, Louis-Julien Petit promet, avec La Brigade, de continuer à creuser le sillon d'un cinéma social aussi fidèle au réel que capable de légèreté.

Mine de rien, Louis-Julien Petit est en train de bâtir une œuvre tout sauf négligeable dans le paysage du cinéma français : patiemment, il redonne ses lettres de noblesse à une comédie sociale qui, sans rien taire des difficultés que traversent ses héros – car de toute évidence, c'en sont –, leur autorise leur part de lumière et d'espoir. La précarité et, mécanisation oblige, l'incertitude des emplois des salariés d'un supermarché (Discount) ; la fermeture annoncée d'un centre d'accueil pour femmes SDF (Les Invisibles) ; ici, la réalité d'un foyer pour migrants... Tout participe d'un même vœu, celui de dire la France (« d'en-bas ») contemporaine, ses difficultés, mais aussi sa combativité.

Quand, dans une société immorale et inégalitaire, il convient pour survivre de savoir se jouer des règles, de faire œuvre d'invention, de système D, quitte à flirter avec l'illégalité, voire à l'embrasser franchement, les héros – et, plus souvent encore, les héroïnes – de Petit n'hésitent pas.

Le peuple et ses représentants

Ce serait donc le pendant « frenchie » du cinéma social à l'anglaise tant loué (de l'œuvre de Ken Loach à The Full Monty) pour sa faculté à s'emparer du contemporain. Et qui, outre la précision de son écriture (le cinéaste s'est ici adjoint les services d'une documentariste, Sophie Bensadoun, et a enquêté de façon à rendre aussi crédible que possible son évocation, tant du travail en cuisine que de la condition des mineurs isolés étrangers), aurait pour vertu première de savoir faire appel, et confiance, à une troupe d'interprètes à l'équilibre savamment composé.

D'un côté, une poignée d'habitués rompus au genre : Corinne Masiero qui, de Louise Wimmer au cinéma de Kervern & Delépine, met un point d'honneur à prendre à l'écran le parti des sans-grades ; Audrey Lamy, ici de retour après Les Invisibles, et qui trouve chez Petit ses meilleurs rôles... De l'autre, des nouveaux venus de prestige : après Noémie Lvovsky, c'est au tour de François Cluzet de venir apporter un peu de fraîcheur. Et, pour faire le liant, et donner à l'ensemble sa véracité, une escouade d'interprètes et de figurants qui, régulièrement, interprètent des rôles proches de leur quotidien réel – le peuple de Louis-Julien Petit trouve en eux de parfaits représentants.