Sans doute les années qui passent

Après quarante ans d'absence, une femme revient au village où elle est née, et où ses parents sont enterrés. Mais la vallée a disparu sous les eaux d'un lac de barrage. Les maisons sont enfouies sous des mètres de vase. Le cimetière est invisible au plongeur compatissant qui accepte de lui descendre son bouquet. Les endroits émergés dont elle croit se souvenir, ceux où elle a joué, enfant, ne sont pas à la mesure de sa mémoire : ses jambes ont grandi. L'ami d'enfance qui l'accueille, George, est resté au village. Le lac attire les quelques touristes indispensables à la marche de son hôtel et il ne veut rien savoir de plus. Le retour de Christiane l'oblige à remuer ce passé qui leur a été enlevé. Ils sont les seuls survivants du monde englouti, à confronter leurs souvenirs. Ni les lieux disparus, ni les vieux, qui sont morts ne peuvent les départager : de quelle couleur était la voiture de la tante ? De quelle taille, les sapins derrière la chambre des parents ? On ne le saura pas. Mais il suffit des odeurs de feuilles et de terre humide, des quelques notes métalliques égrénées par une boîte à musique pour que le passé ressurgisse.

Dominique Déhan nous invite à une méditation sur la mémoire aux accents tchékoviens, soutenu par Françoise Bette qui tient son rôle avec une remarquable justesse de ton. La retenue des dialogues, la délicatesse des images en font un film d'une qualité rare. Sans doute les années qui passent est son troisième film après l'Ephéméride (1987) et l'Agrandisseur (1995).