Sweat

Magnus Von Horn dresse le portrait sans filtre d’une influenceuse et coach sportive polonaise. Après Le Lendemain, le cinéaste suédois signe un second film frappant sur la célébrité et l’isolement à l’ère de l'hyperconnexion.

Blonde, souriante et au physique parfait, Sylwia partage virtuellement chaque instant de son quotidien avec ses 600 000 abonnés. Lorsqu’elle avoue à ses followers se sentir profondément seule, la vidéo d’elle en pleurs devient virale. Pendant trois jours, nous suivons la vie de Sylwia entre les séances de fitness, les repas healthy et les courses en voiture d’un rendez-vous à l’autre à travers la périphérie de Cracovie. C’est une esthétique à deux vitesses qui est proposée ici, celle montrée par Sylwia à travers son portable, et celle de la réalité qui amène la protagoniste à se déplacer dans une ville dont les bâtiments anonymes aux mille fenêtres et les rues presque désertes évoquent sa condition réelle.

Plutôt que montrer les coulisses du travail d’une influenceuse, le réalisateur part de ce personnage emblématique pour tisser un portrait extrêmement cru et réaliste de notre société, où la communication omniprésente et les faux liens créés par les réseaux sociaux dissimulent la frustration du manque de véritables rencontres.

La solitude derrière les écrans

Dès les premiers plans du film, on se rend compte que la protagoniste est seule à l’écran, et qu’il en est de même pour celui de son smartphone, seul compagnon de ses journées à l’exception d’un fidèle petit chien. Lorsqu’elle découvre avoir un stalker (un individu qui épie ses faits et gestes), Sylwia l’observe à son tour par la fenêtre de son appartement, et sa présence semble être à la fois inquiétante mais tout autant rassurante. La force de Sweat réside justement dans l’interchangeabilité des rôles et des points de vue entre les acteurs et le spectateur lui-même, dont le regard devient celui d’un voyeur ou d’une caméra de surveillance, qui prend du plaisir à regarder sans être impliqué et à contrôler sans être vu. Au fur et à mesure du récit, on comprend que derrière les innombrables vitres qui séparent les personnages se cache en réalité cette solitude réelle, et indivisible, qui pourtant nous unit.