Un homme qui crie

Adam est maître-nageur dans un hôtel de luxe à N’Djamena, capitale du Tchad. Il vit très mal sa situation actuelle. Lors du rachat de l’hôtel par des entrepreneurs chinois, cet homme sexagénaire s'est en effet vu obligé de laisser la place à son fils. Or, cela représente pour lui un difficile compromis : comment abandonner son unique souvenir des années glorieuses, lorsqu’il était champion de natation ? Pourtant, ce conflit des générations n’apparaît que comme un moindre problème. Le pays subit une guerre civile qui oppose les rebelles au gouvernement. Face aux avancées des premiers, le deuxième fait appel à l’ « effort de guerre » de la population. Sans argent, le seul effort qu’Adam puisse fournir, c’est son fils…

Récompensé par le Prix du Jury au Festival de Cannes 2010, ce quatrième long métrage de Mahamat Salet Haroun surprend par sa justesse. Sans misérabilisme, il nous livre le portrait d’un pays aux abois. Pourtant, ce n’est pas la dimension politique du conflit qui l’intéresse. Préférant envisager la guerre sous l’angle de son appréhension, le réalisateur nous présente des personnages en situation précaire. La direction des acteurs, souvent elliptique et suggestive, donne lieu à des dialogues d’une grande sincérité. Le message politique est sans doute ailleurs : dénonçant les effets pervers de la mondialisation, Mahamat Saleh Haroun mesure les conséquences de celle-ci sur le destin individuel des hommes.