Tom Yang et Olivier Pelmoine

D'abord il faut souligner la cohérence et la performance : le duo chant-guitare donne une tout autre couleur à ces Lieder ; la guitare apporte une douceur, une légèreté ironique, presque caustique parfois, qui sied bien au poème. Ça colle aussi parfaitement à l'espace intime du concert de salon. Et puis vous êtes tous les deux très photogéniques. Mais la présence scénique de Tom, son occupation de l'espace, son expression corporelle, sa gestuelle, son expressivité -suggestive sans être surjouée- font merveille. On a le sentiment qu'il comprend et fait comprendre, éprouve parfaitement ce qu'il chante ; du coup, le chant en ressort naturel comme jamais. On a vraiment l'impression que vous venez de débarquer l'un et l'autre, tels des exilés, routards ou clochards assis sur un banc au coin d'une maison ou dans un jardin public... Chose assez rare en lyrique : la diction est si nette qu'on comprend très bien les paroles (alors que souvent, même en français, on ne s'y retrouve pas, et on n'a plus que la musique à savourer). J'ai pu noter plein de bribes de phrases en allemand, c'est une grande satisfaction... Dans votre performance, on a vraiment l'impression que tout est à sa juste place, y compris nous autres spectateurs. Je n'avais jamais aussi bien VÉCU le chemin de croix solitaire et prolixe de ce pleurant-souriant, mélancolique mais jamais lugubre (un proverbe dit que le tzigane rit en pleurant). Vous êtes là, à côté de nous, et c'est très très troublant... Votre "Voyage" n'a plus besoin de mener quelque part (d'ailleurs, il ne mène nulle part) tant il est envoûtant et hypnotique. Pour la guitare, je crois qu'elle ne risque rien à accuser les contrastes entre les passages sautillants, staccato même et les moments plus pesants, lents, graves comme un cœur lourd (particulièrement pour le 6è Lied). Pour ça, les ultrabasses de la théorbure gagneraient à être plus sollicitées (je sais que tu le sais) ; ça me semble important pour que la guitare fasse oublier le piano aux plus ronchons des traditionalistes, et qu'elle porte un peu plus le chant !... Sinon, comme ça, en vrac : j'ai particulièrement apprécié chez vous 2 le 5e Lied, le "LindenBaum", qui sonne souvent un peu trop "folklo", et qui la n'avait rien de ridicule ; serait-ce grâce à la tonalité rabaissée pour la guitare ?... Aimé aussi le sixième ou la guitare passe du sautillant à l'envoûtant...