Un herbier-monde : la bibliothèque botanique de Benjamin Delessert (1773-1847)

La botanique gagna d'abord Benjamin Delessert comme une passion familiale. Né en 1773 à Lyon dans un milieu protestant d’origine genevoise acquis aux idées philanthropiques et progressistes, il fut appelé à présider, tout jeune homme encore, aux destinées de l’établissement bancaire paternel, puis de ses propres entreprises, et réunit une importante fortune personnelle qu'il consacra à l’œuvre de sa vie : rassembler l’une des plus importantes collections botaniques au monde, et en faire bénéficier l’ensemble de la communauté des savants.

Alors que son herbier personnel s’enrichissait de pièces historiques provenant des pères fondateurs de la botanique (Linné, Plumier ou Hermann), son esprit curieux le portait dans le même temps vers l’innovation scientifique et le soutien aux disciplines nouvelles préfigurant l’écologie. Une adhésion enthousiaste aux recherches sur la classification naturelle développées par son ami Augustin-Pyramus de Candolle, et la place faite dans sa vaste bibliothèque à la géographie botanique naissante, l’engagent à soutenir des expéditions naturalistes et à contribuer à des entreprises majeures de l’édition botanique du XIXe siècle. L’intuition visionnaire de l’impérieuse nécessité de réunir les savoirs sur le monde végétal, explique à la fois sa pratique altruiste de la collection, ses engagements éditoriaux, et son intervention déterminante dans la communauté scientifique.

Léguée à l’Académie des sciences en 1869, cette collection de 8 500 titres est conservée depuis à la bibliothèque de l’Institut. L’exposition retrace les contours et les usages d’un « musée botanique » exceptionnel, et interroge les fonctions de l’herbier – qu’il soit naturel ou figuré – à la lumière des enjeux actuels de préservation de la biodiversité.