[expo] Artemisia, héroïne de l’art : Stabat furiosa !

Judith et sa servante, v. 1618-1619, Florence, Gallerie degli Uffizi, Galleria Palatina © Su concessionne del Ministera della Cultura

Le Musée Jacquemart-André rend hommage à Artemisia Gentileschi, une des rares femmes à avoir été reconnue de son vivant comme un maître. Entre Eros et Thanatos, éclate la lumière de la chair !

On tait parfois la vie de l’artiste pour pouvoir célébrer son œuvre… En notre époque où quelques soleils voient leur éclat terni pour avoir impudemment darder leurs rayons, Artemisia Gentileschi apparaît comme un contre-modèle. Violée par Agostino Tassi, qui devait lui enseigner la perspective et lui refusa le mariage en guise de réparation, au terme d’un procès où elle fut torturée pour prouver la véracité de ses accusations, elle est devenue depuis une icône féministe. Au-delà de la récupération mythifiée, l’exposition pensée par Patrizia Cavazzini, Maria Cristina Terzaghi et Pierre Curie la resitue en son temps et dans l’histoire de la peinture.

Gloire, oubli et résurrection

La fille d’Orazio Gentileschi, peintre influencé par Caravage, témoigna d’un talent précoce et singulier : la mise en regard des œuvres des deux artistes prouve combien les fruits peuvent passer la promesse des fleurs ! Ses contemporains la placèrent parmi les plus grands, jusqu’à rivaliser en gloire avec le maître du clair-obscur, et elle honora des commandes dans toute l’Europe. La fin du XVIIIᵉ siècle la fit sombrer dans l’oubli avant qu’elle ne soit redécouverte au XXᵉ : son œuvre connut, à cet égard, le même destin que celle de Caravage, la bienséance préférant toujours enterrer l’audace.

Femme puissante

Artemisia Gentileschi fait preuve d’une sidérante capacité à saisir la psychologie de ses personnages, et d’une force troublante, dont atteste la terrible Judith, aussi effrayante qu’une Héra aux yeux de vache, accompagnée par sa servante, tenant la tête d’Holopherne dans un panier. Tout fait frémir et tout fascine : les compositions à la puissance explosive, la splendeur des corps et des couleurs, l’ampleur des mouvements, la crudité du naturalisme, l’intensité des émotions représentées (comme la sublime Madeleine pénitente, prêt exceptionnel de la cathédrale de Séville, magnifiée par sa récente restauration). On a l’impression d’avoir affaire à une femme aussi redoutable que ses formidables sujets.

Exposition Artemisia, Héroïne de l'art au Musée Jacquemart-André, à découvrir jusqu'au 3 août 2025

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