12 hommes en colère au théâtre [critique] : L'ombre d'un doute

© DR

Le metteur en scène Charles Tordjman adapte 12 hommes en colère, la pièce de Reginald Rose. Ou comment un jury se déchire sur la culpabilité d’un jeune homme accusé du meurtre de son père.

Il fait une chaleur torride, en ce soir de délibération. Les esprits vont d’ailleurs vite s’échauffer. Le jury d’un procès pour meurtre s’apprête à sceller le destin d’un jeune homme de 16 ans, accusé d’avoir poignardé son père. Les douze hommes rassemblés en sont certains : c’est un assassin. Un seul s’élève et remet en cause « l’évidence ».

Le comédien marche là sur les traces de Henry Fonda, vedette de la célèbre version cinéma par Sidney Lumet de la pièce de Reginald Rose. L’ombre de la star pourrait être pesante, mais avec douceur et empathie, l’artiste parvient à nous faire sentir le poids de la responsabilité qui lui incombe.

Un doute légitime

Car il doute et met au défi ses « collègues » de lui prouver que le jeune homme, qui a subi les coups d’un père violent, mérite la chaise électrique. La plupart d’entre eux, uniquement caractérisés par un numéro et une profession (architecte, horloger, publicitaire…), a déjà décidé que celui-ci était coupable à cause d’un certain déterminisme social : l’accusé est « une racaille » issue des quartiers pauvres, osera dire l’un d’eux, fatigué de ce jeu entre « intellectuels » et pressé de quitter ce huis clos suffocant.

Rapports de classe

C’est l’un des aspects les plus intéressants de la pièce, quand, par exemple, un banquier bien installé décide du sort de quelqu’un d’« inférieur » à sa classe. Outre l’intérêt sociétal et psychologique (le plus virulent des membres du jury a des choses à régler avec son fils « ingrat »), on peut apprécier toute la mécanique d’enquête du juré « rebelle », laquelle lui permet de gagner des soutiens. Quel était vraiment le mobile ?  Les vieux voisins ont-ils vraiment vu le crime ?… Cette démonstration ultra efficace, aux accents parfois comiques et donnée dans un décor épuré de bunker, fait se poser des questions essentielles sur la justice expéditive.

12 hommes en colère, à découvrir actuellement au Théâtre Hébertot : réservez vos places avec L'Officiel des spectacles

Partager cet article sur :

Nos derniers articles

Maxence Gaillard s’installe brillamment au Lucernaire avec la pièce imaginée par Stéphane Landowski autour de la guerre des courants, qui marqua les débuts de la maîtrise de l’électricité.

Après le verger sous les étoiles de Fontaine-Guérin, où a été créée la trilogie à l’été 2024, le NTP propose une divine comédie avec Balzac en nocher, à l’intérieur du théâtre de La Tempête.

Victor Rossi reprend avec Matthew Luret la pièce qu’il a écrite et créée avec Antoine Demor. Un petit bijou théâtral, fin, vif et incisif, d’une grande intelligence et d’une implacable lucidité. Glaçant !

Au Théâtre Saint-Georges, Clément Viktorovitch, seul en scène, libère du temps de cerveau disponible en déjouant la confusion entre les vessies et les lanternes. Rallumons les lumières !

La newsletter

Chaque mercredi, le meilleur des sorties culturelles à Paris avec L'Officiel des spectacles !