[critique] C’est pas facile d’être heureux quand on va mal : Enfants de Bretécher et de Woody Allen

Molière de la Meilleure comédie et Molière du Meilleur auteur francophone vivant pour Rudy Milstein dont le spectacle pétillant fait son retour au Théâtre Lepic à la rentrée : à ne pas rater !
Ils ne vont pas bien du tout ! Ils font pourtant des efforts : Nora et Jonathan couchent ensemble le mercredi (bel exploit quand on ne s’aime plus !), Timothée multiplie les partouzes pour rencontrer l’homme de sa vie en espérant qu’il admirera sa thèse interminable sur les mots qui n’existent pas en français, ce que Maxime peine à comprendre et le conduit à s’épancher auprès de son psy, qui n’est autre que Jonathan, le meilleur ami de Timothée. Et Jeanne dans tout ça ? Elle a un cancer, donc ça va, même si elle regrette un peu que son orthopraxie alimentaire ne l’ait pas mieux préservée !
Miroir de l’époque
On rit beaucoup au spectacle des déboires de ces Parisiens entre 30 et 40 ans, avatars contemporains des Frustrés, qui n’ont rien à envier à leurs ancêtres croqués par Bretécher. Rudy Milstein trempe sa plume dans le fiel et le miel et égratigne allègrement ces bobos désopilants qui ont tout pour être heureux sans le désir de l’être vraiment ni la lucidité nécessaire pour se contenter du moindre mal. On pourrait les trouver odieux mais leur auteur réussit à les rendre extrêmement attachants, peut-être parce qu’il ne les juge pas, même s’il ne les excuse guère…
Brillant quintette
En scène, Rudy Milstein, Nicolas Lumbreras, Erwan Téréné, Zoé Bruneau (en alternance avec Ariane Boumendil) et Baya Rehaz (en alternance avec Constance Carrelet) sont excellents. La mise en scène de Rudy Milstein et Nicolas Lumbreras les entraîne dans cette course folle avec un aplomb et une précision jubilatoires. La scénographie de Natacha Markoff et les lumières de Denis Koransky fabriquent un décor qui devient partenaire de jeu : on passe en un clin d’œil de l’appartement de Nora et Jonathan à la librairie de Jeanne, du bar des coups d’un soir au métro des coups de mou. Une telle ingéniosité soutient le dynamisme de la pièce, vive, efficace et brillante. Woody Allen est à Manhattan, Rudy Milstein à Paris : mutatis mutandis, nihil novi !
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