[critique] Allosaurus [même rue, même cabine] : Le téléphone pleure 

© DR

Trois solitudes se retrouvent autour d’une cabine téléphonique d’un autre âge. Une pièce émouvante et aux idées visuelles poétiques signée par la compagnie F.O.U.I.C.

À l’heure du téléphone portable, la cabine téléphonique est une antiquité obsolète, tout droit sortie de la Préhistoire. Cette boîte en verre d’un autre âge est pourtant un catalyseur d’émotions dans Allosaurus, titre en référence au dinosaure disparu il y a 150 millions d’années et donc fort à propos. Dans cette pièce de Jean-Christophe Dollé (de la compagnie F.O.U.I.C), trois personnages paumés et marginaux s’y croisent sur une musique atmosphérique, mélancolique ou tonitruante (lors des moments de tension) interprétée sur scène par Noé Dollé.

Modern solitude

Leur solitude est d’autant plus soulignée à travers le principe du monologue (on n’entend pas leur interlocuteur au bout du fil). Il y a Had (Yann de Monterno, très touchant), un travesti malaimé par sa mère bien ingrate. Celle-ci lui préfère Jo, un fils « normal » qui part en voilier avec sa famille au lieu de lui rendre visite. Tadz (Jean-Christophe Dollé), au look de rocker, s’inquiète pour sa fille majeure « mais instable ». Et enfin, Lou « comme l’animal » (Clotilde Morgiève, écorchée vive) cherche un peu d’amour en appelant au hasard des inconnus. Celle qui « tombe depuis des heures » a la chance de parler avec la douce Suzanne. Mais Lou a perdu son numéro de téléphone...

Aimer à la folie

Le texte, touchant et qui joue avec le hasard, n’est qu’empathie pour ces anti-héros en quête d’amour absolu. Mais le monde est dur : au téléphone, Tadz se heurte à un agent de police peu compatissant, Lou a droit à des interlocuteurs salaces et Had doit se faire passer pour son frère pour s’attirer l’amour maternel. Il fallait que ces trois-là, au bord de la rupture émotionnelle, se trouvent pour se réchauffer le cœur. Au lieu d’un mélo qui déborde, on a droit à un conte onirique nocturne aux idées visuelles, lumineuse, belles et poétiques. Et pour inclure un peu plus le public, celui-ci est mis à contribution (cinq personnes, sur 25 « formées », jouent chaque soir). Formidable idée pour soutenir ce trio très attachant.

Allosaurus [même rue, même cabine] au Théâtre-Studio d'Alfortville : réservez vos places avec L'Officiel des spectacles

Partager cet article sur :

Nos derniers articles

Publié le 25 mars 2025 [Théâtres]

Fondatrice du Théâtre La Flèche, Flavie Fontaine dirige avec passion cette mine à pépites, tremplin pour les compagnies émergentes, encourageant un théâtre poignant, authentique et juste. Entretien.

Fabien Gorgeart met en scène un brillantissime trio dans l’adaptation scénique du roman de Delphine de Vigan. Nouvelle pépite au Petit Saint-Martin : un spectacle bouleversant et passionnant.

En mars 2025, Peter Brook aurait eu cent ans. Le Théâtre des Bouffes du Nord, qui fut le sien pendant un demi-siècle, reprend son dernier spectacle. Hommage au maître, au théâtre et à la liberté.

Mis à jour le 7 mars 2025 [Théâtres]

Toutes les informations sur la 36ᵉ cérémonie des Molières, récompensant les spectacles et artistes les plus remarquables de l'année écoulée au sein des théâtres français.

La newsletter

Chaque mercredi, le meilleur des sorties culturelles à Paris avec L'Officiel des spectacles !