[critique] La Crème de Normandie : Vive la bonne chair !
Le Théâtre du Gymnase accueille la désopilante comédie d’Hervé Devolder et Milena Marinelli qui narre en chansons les aventures d’une maison close maquillée en orphelinat. Délirant et exquis !
Bernard Dimey le regrettait avec humour : on a vraiment fait une connerie en fermant les bordels ! Les filles y tapinaient au sec et les clients y étaient reçus au chaud. La viande était bien gardée et la vérole bien surveillée. Hervé Devolder et Milena Marinelli ont imaginé un voyage dans le temps, à la belle époque de la tolérance, des lanternes rouges et des canapés en velours, quand les maris pouvaient assouvir leurs fantasmes pendant que leurs régulières s’époumonaient à chanter des cantiques. On est à Elbeuf, à la Rose éclose, haut lieu des plaisirs normands.
Amusant bouiboui
Comme souvent l’entreprise quand elle est étranglée par la concurrence, celle de Philidor Fromentelle bat de l’aile. Il espère redorer la réputation de son claque et cherche le moyen d’en renflouer les caisses. Le quiproquo, carburant indispensable à la farce, va faire des miracles, puisque Lucienne Fromentelle se pique de venir faire la charité aux pensionnaires du foutoir qu’elle croit être des orphelines méritantes et dévotes. Parce que la comédie est encore plus savoureuse quand elle est sociale et qu’elle dénonce l’exploitation des femmes et l’humiliation des asservies, le malentendu conduit à la rédemption et à la sortie du ruisseau.
Joyeux boxon
Mise en scène par Hervé Devolder, qui en a aussi composé les musiques, cette sympathique et allègre pantalonnade emprunte sa forme au vaudeville et à la comédie de mœurs, étrillant gaiement la phallocratie benoîte et la bêtise des mâles dominants. Le décor de Jean-Michel Adam et les costumes de Jean-Daniel Vuillermoz s’inspirent des tableaux de Toulouse-Lautrec et offrent un charmant terrain de jeu aux comédiens qui chantent, dansent et jouent avec un bel entrain. Cornette et froufrous, prince charmant et catins délurées, bourgeois priapiques et matrone au grand cœur : la troupe interprète ces personnages fantaisistes avec un solide abatage ! Que la morale et les féministes se rassurent : tout est bien qui finit bien et la bidoche passe du lit à l’assiette !
La Crème de Normandie au Théâtre du Gymnase : réservez vos places avec L'Officiel des spectacles
Partager cet article sur :
Nos derniers articles
Maxence Gaillard s’installe brillamment au Lucernaire avec la pièce imaginée par Stéphane Landowski autour de la guerre des courants, qui marqua les débuts de la maîtrise de l’électricité.
Après le verger sous les étoiles de Fontaine-Guérin, où a été créée la trilogie à l’été 2024, le NTP propose une divine comédie avec Balzac en nocher, à l’intérieur du théâtre de La Tempête.
Victor Rossi reprend avec Matthew Luret la pièce qu’il a écrite et créée avec Antoine Demor. Un petit bijou théâtral, fin, vif et incisif, d’une grande intelligence et d’une implacable lucidité. Glaçant !
Au Théâtre Saint-Georges, Clément Viktorovitch, seul en scène, libère du temps de cerveau disponible en déjouant la confusion entre les vessies et les lanternes. Rallumons les lumières !