[critique] La Note : Allegro ma non troppo
Sophie Marceau et François Berléand interprètent la pièce la plus courue de la rentrée. Leurs fans les retrouvent avec joie dans une scène de ménage pour pendu et piano.
Dans Pour introduire le narcissisme, Freud affirme que « l’homme n’a que deux objets primitifs : lui-même et la femme qui s’occupe de lui. » Julien, le personnage incarné par François Berléand, est psychanalyste, et on peut supposer qu’il a lu Freud. Comme il n’aime plus ni ce qu’il est, ni ce qu’il a été, ni ce qu’il voudrait être, et puisque sa femme, Maud, est absente, il décide de se pendre. La pièce d’Audrey Schebat commence par une désopilante scène de suicide, dans laquelle François Berléand tente de se supprimer, après avoir arrimé la corde fatale au piano de son épouse. Mais, patatras ! Maud rentre plus tôt que prévu…
Corde sensible
De corde délaissée en liens à retisser, d’accords perdus en désaccords assénés, Julien et Maud passent la soirée à tâcher de retrouver l’équilibre et l’harmonie. Maud ne fait pas dans la dentelle et règle allègrement ses comptes avec l’égoïsme de Julien, dont elle peine à admettre qu’il a le narcissisme en berne. Sophie Marceau est drôle dans son rôle de matérialiste normopathe qui ne supporte ni les plaintes de son mari, ni les jérémiades sempiternelles de ses patients. Face à elle, François Berléand campe un bougon sympathique, dont la crise existentielle a des allures de revendication amoureuse : à force de s’occuper des autres, le thérapeute a oublié qu’il avait besoin d’eux.
L’écoute en amarre
Audrey Schebat met en scène les déboires psychologiques d’un couple dont les problèmes sembleraient sans doute un peu vains aux yeux de ceux qui ne possèdent pas un appartement parisien, dont la mise en vente permettrait d’acheter une plage privée à Phuket… Mais Sophie Marceau et François Berléand parviennent à rendre attachants ces deux nantis taraudés par la mort et l’angoisse de n’avoir pas eu la vie dont ils rêvaient. Même le roi est malheureux quand il pense à la misère de sa condition de mortel, disait Pascal. On admettra donc qu’il y a de la profondeur métaphysique dans toute plainte humaine et que le difficile métier de vivre est une gageure universelle.
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