Moi aussi je suis Barbara [critique] : Mon amour, il faut que tu viennes !
A la demande de Pauline Chagne, qui se glisse dans le fourreau de la longue dame brune, Pierre Notte passe de Catherine Deneuve à Barbara : un spectacle saisissant, servi par des comédiens bouleversants.
En 2005, Pierre Notte créa Moi aussi je suis Catherine Deneuve, farce burlesque au grand succès. Les usages de la pâtisserie, du couteau, du revolver et de la projection fantasmatique pour échapper à la névrose familiale y étaient exposés avec la sagacité psychologique et la cruauté lucide dont le dramaturge a le secret. Pauline Chagne lui a proposé depuis de réécrire la pièce autour de Barbara, à qui elle ressemble de façon troublante. La variation risquait de lasser, d’autant que la chanteuse de minuit a la particularité d’être à tous : qui a traîné son mal de vivre entre Rémusat et Göttingen peine à partager Barbara.
Mais à travers leur visage, c’était déjà votre image
Le résultat est pourtant suffocant d’émotion : Pauline Chagne réussit une incarnation qui relève de la transsubstantiation ! Son jeu subtil et la mise en scène très habile de Jean-Charles Mouveaux font merveille. La sidération est totale, de la scène hilarante où Geneviève-Barbara va acheter des œufs au prix d’autographes consentis aux clients et aux vendeurs du magasin, à celle où Pauline Chagne interprète Vienne avec une vérité qui fait croire aux pouvoirs de la métempsychose. Extraits des chansons et verbatim des interviewes se mêlent aux mots de Pierre Notte avec une hallucinante fluidité.
C’est presque rien, mais c’est là, ça vous émerveille
Flore Lefebvre des Noëttes (en alternance avec Chantal Trichet) est géniale en mère débordée par sa progéniture ; Marie Nègre est sidérante en petite sœur cloîtrée dans les affres de l’automutilation ; Jimmy Brégy excelle en frère mutique et dans le rôle des hommes au regard fier des théâtres de Barbara. Au piano, Clément Walker-Viry accompagne la folie dramatique avec élégance. L’exaltation alterne avec la drôlerie, la passion flirte avec le sarcasme, la douleur est consolée par la joie. L’ensemble compose une partition confondante d’humanité, que ceux qui l’interprètent font briller comme un diamant bleu !
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