Maya Ruiz-Picasso, fille de Pablo

Au cœur du Marais, l’hôtel baroque qui héberge le Musée Picasso depuis 1985 renferme la plus riche collection mondiale d'œuvres de l’artiste. Aujourd’hui, il met en lumière sa fille dans une double exposition consacrée à Maya Ruiz-Picasso, sa vie, et sa collection.

Des œuvres nouvelles

Depuis 1968, la loi sur la dation permet le règlement en nature des droits de succession. C’est ainsi que six peintures, deux sculptures et un carnet de dessins de la collection de Maya Ruiz-Picasso, la fille du grand artiste, viennent de rejoindre le fond national par dation, et peuvent enfin être admirées du public. Au rez-de-chaussée du musée Picasso sont exposés ces neuf chefs-d’œuvre parmi d’autres, présentés par ordre chronologique. Et on remonte très loin le temps, jusqu’en 1895. Picasso n’a que 14 ans et il peint divinement bien le profil de son père, Don José Ruiz, sur un fond sombre, les os des tempes saillants, dans un jeu de clair-obscur que l’homme, professeur de peinture, lui a enseigné. On change ensuite de siècle et on bondit en 1938 avec l'Enfant à la sucette assis sous une chaise. Picasso vit alors en France, il est en pleine période de « style araignée » : ses sujets noirs et blancs semblent constitués de fils de soie, les lignes sont saturées, tendues, autant que l’atmosphère dans laquelle il les dessine, au lendemain de la Première Guerre mondiale, à la veille de la Seconde, et en pleine guerre d’Espagne. C’est tout l’intérêt de ces œuvres, qui couvrent toutes les périodes de Picasso, ses inspirations, jusqu’aux années 1970.

Fille à papa

Au premier étage de l’hôtel Salé, on fait ensuite la connaissance de Maya Ruiz-Picasso, née en 1935 de son union passionnelle avec Marie-Thérèse Walter. Elle est son deuxième enfant, mais sa première fille. Picasso, émerveillé, lâche un temps ses pinceaux, il lui construit des jouets. À travers 200 œuvres, archives et objets personnels, on comprend la tendresse toute particulière qu’il avait pour elle, leur relation créatrice. Ainsi, Maya assistera Henri-Georges Clouzot lors du documentaire qu’il réalise sur son père en 1955, dont elle a consacré à vie à la préservation de l’héritage.

Anne-Sophie Jahn